• Les véritables frites Belges

    Les véritables frites Belges

     

    Ici je ne vais pas m’ingénier à vous envoyer vous faire cuire un œuf. Mais à force de les voir massacrées à ce point à l’étranger aussi bien qu’en notre petit Royaume, il me semble opportun de rappeler quelques règles de bases, incontournables et d’ainsi contribuer à ma mesure à mettre un terme à ce belgicide insoutenable.

    1)Une frite digne de ce nom se cuit dans de la graisse de bœuf non raffinée (Blanc de bœuf). Point. Ce n’est pas sain on dira, mais nul besoin non plus d’en manger à tous les repas ou même de les utiliser pour accompagner un plat (sinon peut-être avec des carbonades à la flamande, un filet américain, un pot’je velsh ou bien sûr nos traditionnelles moules traitées à toutes les sauces possibles et imaginables. Sinon, rien ne vaut un simple cornet de frite accompagné de la sauce de son choix ! J’ai bien dit un CORNET ! Le blanc de bœuf se trouve difficilement dans le commerce en dehors de la Belgique et du nord de la France, mais on peut la commander en ligne : http://www.cuisineaddict.com/achat-blanc-de-boeuf-1-kg-4818.htm?gclid=CLTCh7Pd-LkCFUXKtAodRxIAnQ#ectrans=1 ou, plus fastidieux, on peut demander à son boucher de la graisse de rognon de veau puis la faire dégorger dans de l’eau 2-3 heures, la sécher, la faire fondre et filtrer les impuretés.

    Une délicieuse alternative existe : la graisse d’hippopotame. C’est absolument délicieux mais il faut avoir un hippo sous la main, ce qui n’est pas donné à tout le monde. Je précise que cette recette a été testée avec de la graisse d’hippopotame provenant d’un ranch à gibier au Rwanda, dévasté depuis le génocide, et que la chasse y était réglementée. Les hippopotames qui font désormais partie  d’une espèce protégée y vivaient en surnombre. Mais ceci ne nous ramènera pas le Congo, et cela reste une recette de petit blanc d’Afrique.

    A défaut du cheval marin, il y a la vraie graisse de cheval, excellente aussi. Mais j’entends déjà « hainir » certains…

    Le saindoux donne aussi de bons résultats, d’ailleurs à leur époque de gloire les fritkots utilisaient un savant mélange de blanc d’œuf, de graisse de cheval et de saindoux.

    Et la graisse d’oie me direz-vous ? Et bien c’est un must pour des pommes-de-terres en tranches rissolées ou coupées en gros quartiers, mais cela nous renvoie à la cuisine du Sud-Ouest, c’est un peu loin de nos latitudes.

    J’entends enfin grincer les dents de végétariens, là je suis obligée de les envoyer sur une voie de garage. 90% de mes recettes sont soit végétariennes ou présentent une variante leur permettant de l’être. Mais ici, je reste ferme sur mes positions et leur laisse l’huile d’arachide et la Végétaline.

    Et en conclusion : non, la cuisson ponctuelle de quelques frites dans de la graisse animale ne vous bouchera pas instantanément les artères et ne vous vaudra pas un billet pour l’hôpital ! En revanche, toutes ces préparations à base d’huiles transformées…c’est un autre combat…

    On retiendra que les frites, c’est de toute façon gras (420 calories environ pour 100g), sans compter la mayonnaise qui est souvent prise en accompagnement. On parle donc d’un petit plaisir à doser à sa juste mesure.

    2) Une frite, une vraie, une belgobelge provient d’une pomme de terre fraiche, de type Bintje. Elle ne sort pas du congélateur.

    3) Une vraie frite se coupe à main humaine, à l’aide d’un bon couteau, et non d’une usine.

    4) Les pommes de terre seront découpées juste avant leur baignade en friteuse et on ne les lave pas car cela ôte l’amidon qui justement donne une belle couleur dorée et empêchera l’intérieur de s’imbiber de gras.

    5) Une frite accomplie prend deux bains de graisse. D’abord 6 minutes à 130-140° avant de reposer une dizaine de minutes, ensuite 2-3 minutes à 180°-190° selon la couleur désirée.

    6) Une graisse de friture doit avoir un bon goût de déjà vu mais pas d’huile de tracteur. Là il est trop tard, il aurait fallu la jeter avant. La graisse sera changée après 10 cuissons et idéalement ne servir qu’à la cuisson des frites. En un aucun cas des fish-sticks ou autre poisson pané ne précèderont la baignade. De plus, la graisse s’oxyde avec le temps. Recouvrez la surface de la graisse une fois refroidie d’un film alimentaire.

    7) On égoutte bien et on sèche pour éviter le ramollissement. On sale bien.

    8) Pas de bonnes frites sans sauce de qualité. On sera donc vigilent quant à son choix. Pour bien faire on se fend même d’une mayonnaise maison.

    9) Ajoutons que si l’on veut être – ou faire comme si l’on était – un vrai Belge soucieux de son environnement, de sa santé et du goût, on utilisera des patates bio. L’affaire n’est pas simple car la qualité de la patate belge à drastiquement chuté, mettant véritablement en péril un élément phare de notre patrimoine gastronomique.

     

    A propos de patrimoine, l’ancêtre de la frite serait du menu fretin pêché dans la Meuse, que les Namurois aux maigres revenus avaient pour habitude de faire frire. C’était une délicieuse manière d’améliorer son ordinaire, d’ailleurs on se régale toujours de friture d’éperlans. Il y a plusieurs siècles déjà, lorsque la pêche se faisait maigre, à défaut de poisson on faisait frire, très probablement dans du saindoux, des bâtonnets de pommes-de-terre, aliment quotidien des gens du peuple. Une chose est certaine, la friture en place publique ne date pas d’hier. Des tableaux de Bruegel figurent la vente de fretin frit. La position géographique du cuisinier génial qui a eu l’idée de remplacer le poisson par de la patate varie en fait très fort selon celui qui contera l’anecdote, passant par les Flandres à Dunkerke et même jusque sous le Pont-Neuf à Paris et il y a fort à parier que la pratique s’est développée dans différentes régions pratiquement en même temps.

     

    Ou aller manger des frites ?

     

    Vous connaissez maintenant le secret de la frite belge, mais au goût et à l’ambiance, rien ne vaut les frites de baraques, servies toutes chaudes dans un beau cornet. Du moins à l’époque…En matière de Fritkot, la tradition se perd, industrialisation aidant, mais aussi à cause des diverses tracasseries administratives dont les commerçants ambulants font l’objet (ainsi que les autres d’ailleurs), les diverses normes soi-disant « saines », la baisse de qualité des pommes-de-terre, etc...

    On se retrouve donc majoritairement confrontés à des frites prédécoupées en sachet lorsqu’elles ne sont pas carrément surgelées, plongées dans de l’huile végétale où trempe allègrement divers autres aliments industriels, proposés en sus et servies – ô sacrilège – la plupart du temps dans un bac en carton voire en plastique pour gagner du temps. Cette carence qualitative touche aussi  les sauces, généralement grasses et insipides.

     

    On peut toujours se rendre à la Friterie de la place Flagey. Pour moi ce sont les meilleures frites et les sauces sont également excellentes. Je pense par exemple à l’Américaine bien relevée et qui ne goûte pas la mayonnaise comme c’est trop souvent le cas. A condition de savoir patienter dans une file longue comme le bras et surtout de pouvoir encaisser le patron, ultra désagréable, mégalo et paranoïaque. Un bon conseil : si vous avez affaire à la bête, commandez vos frites sans mentionner directement votre choix en sauce. Ne le faites que lorsque cela vous sera demandé, et ne dites rien d’autre, sous peine de vous voir rabroué, insulté ou même franchement rembarré. Frites servies en cornet. Idéal pour les petites faims des oiseaux de nuit puisque le vendredi et le samedi la maison ouvre jusqu’à 2h du matin. Fermé le lundi.

    La Maison Antoine, sur la Place Jourdan 16 à 1040 Etterbeek, remporte depuis longtemps la plupart des suffrages, sans doute par instinct grégaire car j’entends dire aussi que ce n’est plus vraiment fameux. Personnellement je les trouve parfois un peu molles et grasses. C’est évidemment une question de goût, qui me porte à aller plutôt place Flagey : minces et croquantes ou dodues et plus moelleuses : that is the question. Soulignons que la qualité varie chez Antoine, en fonction de qui se trouve derrière la friteuse et que les sauces ne sont pas transcendantes. Une longue file d’attente aux heures de pointe mais un avantage indubitable surtout en temps de chien : les troquets du coin vous permettent de venir consommer chez eux vos frites, à condition de commander une bonne bière bien sûr. De plus la friterie est ouverte 7 jours/7.

    La Friterie de la Barrière de Saint Gilles ,5 Avenue du Parc à 1060 Saint-Gilles est aussi une valeur sûre depuis des dizaines d’années.

    Ceux qui ont été jeunes ces dernières dizaines d’années et ont circulé dans le sud de Bruxelles connaissent « chez Clem’ » autrement dit chez Clémentine, puisque c’est là – à part le café au Cabestan – situé lui aussi place St Job à Uccle, que l’on peut casser une petite graine jusqu’à pas d’heure. En effet, le vendredi et samedi, l’institution est ouverte jusqu’à l’aube.

    Le tram de Boitsfort, Place Payfa au cœur de Boitsfort, propose un bien sympathique concept : dans un tram, la partie de tête est dédiée à la friterie à l’ancienne (double cuisson dans la graisse de bœuf), la queue à un mini restaurant de hamburger dans la vogue slow-food. A ne pas manquer !  La friterie est ouverte 7 jours/7. Parking possible dans l'esplanade à côté du parc et du tram. Le propriétaire était déjà l’initiateur des foods trucks « Pâtes Partout » proposant des cornets de pâtes fraiches artisanales.

    Chez Fernand, 187 av. Georges Henri 1200 Woluwe-Saint-Lambert. Une friterie « en dur », donc n’offrant pas le charme bucolique de la baraque, mais qui compense par la qualité de ses frites et offre une terrasse. Fermé le lundi.

    La frite, rue de la Cité 5 à 4000 Liège. Un petit resto qui sert des frites fraiches, coupées juste avant cuisson à la graisse de bœuf avec des sauces maison. Fermé les lundi et mardi.Le patron loue aussi les services de friteries ambulantes pour vos événements.

    Pour aller plus loin…

    www.homefrithome.com : une galerie d’art Belgo-Belge, des objets amusants sur le thème de la frite,  un gîte grand confort et un micro Musée de la Frite, 242 rue des Alliés à 1190 Bruxelles - Chaque 1er week-end du mois, le Samedi: de 13h30 à 18h30 et le Dimanche: de 13h30 à 18h00 - Home Frit’ Home en portes ouvertes gratuites: samedi 1er août, de 13h30 à 18h30 et dimanche 2 août, de 13h30 à 18h00.

    Le musée de la frite à Brugge : Frietmuseum, Vlamingstraat 33 - 8000 Bruges - Tel. +32 50 34 01 50

     

    Dites-le avec …une frite

     

    Le « doigt d’honneur » en frites est devenu l’un des symboles du mardi 22 mars, jour où Bruxelles a été la cible de deux attaques terroristes. On l’a vu abondement relayé sur les réseaux sociaux. Cette image d’un paquet de frites formant un « doigt d’honneur » dressé face au terrorisme djihadiste est tirée d’une publicité de la chaîne de restauration rapide américaine Burger King.

    Les véritables frites Belges

     

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